Artiste en résidence de septembre à décembre 2007.
Née en 1974 . Vit et travaille à Saubion (Landes).

En résidence à Monflanquin, ROCANOSSE a proposé à des volontaires d’horizons divers de venir poser librement dans son atelier et de participer à une série de portraits dessinés et photographiés.

Invités à livrer une part d’eux-mêmes ses modèles ont pris place au sein de ce que Raphaële qualifie de dispositif de “réconciliation avec l’espèce humaine” . 

Ses portraits fixent la trace d’échanges ou le rôle de l’artiste et celui du modèle se confondent…

Raphaële cherche dans le pluriel des autres, sa singularité, la réponse à ses propres mystères.

Elle interroge des natures, des traits, des poses. Elle se fond dans d’autres réalités pour mieux observer la sienne…

(…) Au gré de contacts fortuits, ces diptyques racontent la multiplicité des individus et cherchent la place de chacun.

Proposer, au fil des rencontres, de prendre la place des gens et d’inverser ainsi les rôles de photographe et de photographié. Les considérer comme “les gens” et être “moi”.

Se dire ainsi l’un à l’autre son existence, à travers l’échange de la représentation de soi, taquiner alors le narcissisme, interroger l’idée de singularité, invoquer la scission de la personnalité. Jouer chacun son rôle insignifiant, vivre ensemble une poignée de temps et se séparer en gardant juste une image de soi qui pourrait être l’autre (…)                   

Dans ses portraits dessinés, photographiés, ROCANOSSE cherche d’abord à mobiliser son regard vers l’extérieur, à entrer en communication avec l’autre. La quête d’identité et de savoir qu’elle développe ainsi, emprunte les voies de la rencontre, de l’invitation et de l’échange. Le déplacement qui perturbe le rôle de l’artiste et celui du modèle constitue le mode privilégié de l’exploration de soi-même. Ce qu’il faut faire, c’est se rendre disponible, provoquer des situations de partage, entrer en contact avec les certitudes et les interrogations, les ouvertures et les blocages des regards et des paroles sollicités, devenir l’autre. Les portraits ne sont plus uniquement des propositions visuelles des « volontaires de divers horizons » venus poser dans l’atelier ou acceptant de laisser leur place à l’artiste. Ils sont à la fois des moments de proximité et de décentrement qui nous communiquent leurs vibrations et nous enveloppent de leur secrète signification. On assiste curieusement, dans ces travaux, à une diversité de mouvements, aussi bien physiques [par la forte présence des visages convoqués, la multiplication des personnages et l’indétermination de leur champs d’intervention ou d’apparition) que mentaux (par l’intensité imaginaire des interprétations, l’expérience des dérèglements] ou encore formels (par la différence des pratiques et des registres). Pour ROCANOSSE, la valeur de cette démarche consiste moins dans ce qu’elle décèle que dans la relation qu’elle s’impose d’établir entre elle-même et ce qu’elle découvre. Cette connexion recherchée avec l’autre répond à l’urgence de sortir d’elle-même, de se détourner de ses vertiges les plus obscurs et d’exister dans et avec le monde, de prendre conscience des impératifs de cette existence. Parler avec l’autre, c’est aussi s’adresser la parole. S’inscrire dans le sillage de l’autre, c’est aussi définir sa trace. Dessiner, photographier l’autre, c’est aussi traverser un miroir et rejoindre ce qu’il ne renvoie pas. Le portrait devient alors la possibilité d’explorer la singularité d’une représentation dont l’apparente façade dissimule des trajectoires, des évènements, des fêlures et des fantasmes dont l’artiste est l’observateur privilégié dans le but d’en saisir, d’en comprendre les éclairages et de s’en servir pour donner plus de netteté à sa propre image.

Didier ARNAUDET