FLORIAN BALZE

Artiste accueilli en résidence de novembre à février 2002.


Né en 1969. Il vit et travaille à Munich.

 

Florian BALZE vous posera sinon un problème, des questions : le travail qu’il propose échappe presque toujours à une identification claire et nous impose de resituer les limites qui définissent le champ de l’Art.
Usant de palettes oubliées, de matériaux ignorés, revisitant les rayonnages de l’histoire, dans ses codes, ses modes esthétiques et plastiques, Florian capte, recense, repère la matière d’une création qui sait jouer des ambiguïtés qui la nourrissent.

Il réussit par-là une performance : celle de reposer avec intelligence des questions essentielles dans des formules qui incitent à l’expérience, autorisent le plaisir du jeu et mettent à jour nos rapports complexes, incertains et arbitraires avec des notions telles que la qualité ou la beauté…

Si Florian BALZE n’impose rien, il sait être un rien provocateur pour ébranler nos certitudes.
L’installation de « parasites », fausses fenêtres, fausses bouches d’aération dans des espaces publics (Installierte Fotoartbeiten. Münich 1998) ramène avec habileté et malice au trompe-l’œil, à un rapport au réel et à l’image que l’art contemporain ne cesse de questionner.

Il n’en cède pas pour autant à la facilité du contre-pied radical et systématique : Florian propose, dispose et assemble les pièces de «mécaniques plastiques» qui lui sont propres, mais qui affirment leurs logiques comme une évidence.

L’utilisation de procédés simples comme dans la série de photo-sculptures d’Ostberlin Room, ( 1998), souligne la volonté de F. Balze de ne rien démontrer par le geste ou le processus de fabrication de l’œuvre.

« kallersheim/Siedlung / 1999 » en est aussi l’illustration. Les formes et couleurs induisent le matériau qui devrait la composer. Une lecture plus attentive révèle une texture grossière mais intentionnelle, qui relativise l’aptitude du regard à fournir une analyse objective…

Florian s’invente de nouveaux lexiques, se frotte à l’exercice des styles. Les découpe, les manipule, les mixe.

Florian s’abreuve à toutes les sources, qu’elles soient définies comme relevant de l’univers du bricolage et de la décoration bon marché, ou de terrains communément attribués au champ artistique.

Unité d’attente convoque le spectateur à une expérience, à un entretien avec l’œuvre. Elle lui parle de formes, des couleurs et de matières et de son créateur dont la définition reste ouverte. Peintre, menuisier-ébéniste, sculpteur, installateur, photographe… Une sorte de réconciliation entre tous ces petits mondes.

Denis DRIFFORT

D’abord, tout semble se donner clairement. C’est une sorte de colonne. Un fragment d’architecture. C’est un élément mobilier. Une structure d’accueil et d’attente. Puis, viennent les doutes, les interrogations. Pourquoi ces couleurs et ces matériaux? Quelle est la véritable motivation de cette organisation formelle? Que faut-il percevoir? Faut-il mettre en doute cette fonction apparemment utilitaire? Et, dans ce cas-là, que faut-il penser de cette capacité métaphorique sensible? Où doit-on se situer? Quelle attitude doit-on adopter?
Bien sûr, il y a des repères, des ressemblances, parallèles, des échos qui s’inscrivent dans un assemblage où rien n’apparaît particulièrement incongru. Et pourtant, le grain de sable est bien là. Efficace, mais insaisissable. Il faut donc bien finir par l’admettre: les propositions de Florian Balze ne sont pas de simples élaborations formelles qui s’imposeraient comme des constructions identifiables, se présenteraient comme des énoncés ne posant pas de problème et ne suscitant aucune difficulté de visibilité et de compréhension. Elles se donnent à voir, au contraire, comme des objets à interroger, à expérimenter, à comprendre. Nous remarquons alors l’élargissement de l’éventail des sensations tactiles et visuelles procuréees par l’emploi de couleurs insistantes ou fragiles, de matériaux lisses ou curieusement rugueux et de formes qui, à la fois, obéissent à des contraintes strictes et favorisent une ouverture comme libre intervention interprétative. Nous pressentons une pluralité de frontières, de relations de connexions dans les enjeux de ces agencements étrangement transparents et familièrement fictionnels. Ces productions, singulièrement dénuées de définition, en mettant l’accent sur la subtile curiosité de leur matérialité et de leur investissement formel, nous posent la question de la place du réel et de l’imaginaire . Elles nous obligent à les décoder, les expliquer, les investir, les interpréter. Elles tendent à susciter un exercice permanent d’adjustement de notre positionnement, de réorientation de notre regard. Et ce n’est d’ailleurs qu’en acceptant cette mobilité que nous pourrons tenter de cerner la globalité de la structure, la variabilité infinie de ce qui, en elle, et de diverses matières, est intérieur et extérieur, fonctionnel et décoratif, sculpture et prototype, composition et déception, masse et façade, registre figuratif et flottement incertain, combinaison et fragmentation. Dans ce travail d’approche, la perspective sous laquelle la proposition peut être observé se modifie. Elle nous renvoie aux fragments d’images que notre mémoire peut recycler et , dans le même temps, elle nous révèle progressivement de nouveaux points de vue sur elle-même. Finalement en tentant de la pénétrer et de se l’approprier, bien loin de parvenir à un résultat concret et à la maîtrise d’une unique image, nous basculons dans le questionnement incessant d’une structure qui ne se livre jamais dans son entier, qui demeure relatif à l’observation que nous en faisons, refusant de se livrer comme une unité rassurante.

Didier ARNAUDET

Florian BALZE
Catalogue 24 pages couleurs – 16 x 21 cm . + Couverture et photographies couleurs.
Epuisé
Texte : Didier ARNAUDET / Denis DRIFFORT